Matthieu Vincent, fondateur de Digitalfoodlab répond à nos questions, il intervenait au Foodtech Festival qui a eu lieu à Nantes le 19 octobre.
Matthieu Vincent fondateur DigitalFoodLab
AD : Bonjour Matthieu, lors du Foodtech Festival organisé par Start up Palace vous avez présenté une vision plutôt rassurante et optimiste des perspectives de la foodtech, en relativisant les échecs de certaines start ups et en rappelant que la France s’en sortait plutôt bien ?
MV : Oui on a oublié entre 2020 et 2021 que l’univers des start ups n’était pas efficient. Dans cette période on a tout financé ! Il y a environ 92% d’echec sur les start ups existantes et sur celles qui sont financées, seules 1 à 5% créeront de la valeur.
C’est le principe, on dépense beaucoup d’argent, il y a du gâchis en revanche on va très vite, plus vite que si la sélection était plus importante.
Aujourd’hui, il y a toujours du financement, en France les investissements baissent mais moins vite qu’ailleurs en Europe et dans le monde.
AD : Quel rôle DigitalFoodLab joue dans la transformation du secteur agroalimentaire ?
MV : Nous sommes consultants pour des grands groupes européens agri, agro et dans le secteur de la distribution.
Nous les aidons à identifier leur écosytème d’innovation et à définir leurs priorités.
AD : Quels sont les directions les plus prometteuses
selon vous ?
MV : Nous avons défini 6 grands axes :
- Les protéines alternatives, fermentation de biomasse, fermentation de précision, molecular farming (OGM)…
- La ferme résiliente : pour une agriculture plus soutenable
- La digitalisation de l’agriculture qui reste aujourd’hui très papier/crayon…
- L’alimentation comme médecine, qui est une direction intéressante pour les sociétés comme la nôtre avec une population vieillissante
- La distribution « instant retail » : comment la rendre la plus instantannée, une livraison plus fonctionnelle…
- L’automatisation de la chaine de valeur alimentaire, la robotique…
AD : On parle souvent des innovations technologiques mais existe t-il une food lowtech ?
MV : Déjà il faut distinguer les innovations de court, moyen et long terme.
C’est vrai que les entrepreneurs vont souvent vers la technologie alors qu’il y a beaucoup à faire avec des technos qui sont déjà sur l’étagère.
Les innovations de marché, de marques comme Just Spices en Allemagne ou Butternut box (fresh dog food delivery) n’ont pas necessité de développement spécifiques de technologies. La digitalisation pour éviter le gaspillage fait appel à des technologies existantes.
Ces start ups sont lowtech.
AD : Souvent le terme lowtech est lié à des objectifs de préservation des ressources naturelles, de diminution de la pollution…
MV : Mais il y a des initiatives qui ont ces objectifs et qui utilisent de la technologie.
Par exemple à Nantes Toopi organics qui collecte de l’urine humaine pour proposer des biostimulants qui sont des alternatives aux produits azotés (engrais).
On peut ajouter les nouvelles semences moins gourmandes en eau ou plus adaptées aux températures qui s’élèvent, aux productions moins émettrices de carbone.
AD : Dans l’interview que Gaëlle Pantin Sohier nous a accordé, elle disait que l’Europe a pris du retard sur la question de l’agriculture cellulaire par rapport aux États-Unis, à Singapour ou à Israël. Quel est votre point de vue sur ce sujet ?
MV : Si l’Europe met cinq ans de plus pour autoriser ces nouvelles productions mais que ça permet de rassurer, de montrer qu’on a pris toutes les garanties et précautions, c’est plutôt positif. Il n’y a pas d’intérêt à faire la course pour autoriser des produits qui n’existent pas encore ou qui ne sont pas prêts à être commercialisés. Les choses bougent, on est passé d’une opposition de principe il y a 5 ans à une opposition constructive.
Merci Matthieu Vincent – DigitalFoodLab
Propos recueillis par Alexandre Durand de Pareidolies pour direction-marketing.fr